INTERVENTIONS DES ENTREPRISES EN MILIEU SCOLAIRE

Le cas de Morgan avec la campagne

« Le respect ça change l’école »

Correspondance avec le Ministère de l'Education nationale


 

 

Dans le cadre d'une campagne Intitulée "Le respect ça change l'école", le Ministère de l'Education nationale s'est autorisé à diffuser sur son site Internet ainsi que dans divers espaces publics une publicité au profit de la marque de vêtements "Morgan". Dès sa publication, le Collectif Attac IDF Education a réagi car cette opération publicitaire va à l'encontre de la neutralité scolaire de l'Ecole et pousse les élèves à l'acte d'achat au mépris des lois. Sur le thème "Le respect n'est pas à vendre", le Collectif a ausitôt lancé une pétition pour faire retirer cette publicité du site du Ministère de l'Education nationale. Parallèlement, il a mandaté l'un de ses membres pour, dans un premier temps, exiger par courrier le retrait de cette publicité, puis dans un second temps, engager des poursuites à l'encontre du Ministère destinées à remettre en cause le plus largement possible les accords de partenariat entre l'Ecole publique et les entreprises privées.

 

 

1) Première lettre de Christiane au Ministère de l’Éducation nationale

 

 

 

 

 

Mme C. Levilly

43, Avenue de Paris

78000 Versailles

 

 

1.12.2001

 

 

 

Monsieur le Ministre,

 

 

A la suite de mon passage au stand de votre ministère au salon de l’Éducation, je souhaite vous faire part de quelques réflexions.

 

La campagne pour le Respect à l’École y tenait une large place, notamment les affiches représentant une adolescente portant le tee-shirt sur lequel est inscrit :

 

« Le Respect ça change l’École ».

 

Or que peut-on lire au bas de cette affiche ?

 

« Ce tee-shirt est en vente dans le réseau des magasins Morgan »

 

Quand on sait l’état de dépendance psychique et financière dont sont victimes de nombreux jeunes vis à vis des marques ; il me semble difficile et même contradictoire d’associer l’une d’entre elles à la notion de respect.

 

Ayant été informée qu’une publicité pour « Morgan » paraît également sur le site de votre ministère, je tiens à témoigner de mon étonnement et de ma réprobation.

 

Très attachée au Respect du principe de neutralité de l’École, je veux croire qu’il s’agit d’une erreur ou d’un manque de vigilance de certains de vos services et que cette publicité sera rapidement retirée.

 

Si ce n’était pas le cas, pourriez vous m’indiquer quelles sont les motivations en droit de la décision d’organiser en partenariat avec Morgan la campagne d’information sur le respect ?

 

 

Veuillez accepter Monsieur le Ministre l’expression de mes sentiments respectueux.

 

 

 

2) Relance du précédent courrier

 

 

 

 

 

Madame Christiane Levilly                                                                                         13 février 2002

43, Avenue de Paris

78000 Versailles

 

                                                                                                              A Monsieur le Ministre de

                                                                                                                  l’Éducation nationale

                                                                                                                   110, rue de Grenelle

                                                                                                                          75007 Paris

Lettre recommandée avec accusé de réception

 

 

Monsieur le Ministre,

 

J’ai l’honneur de vous rappeler ma lettre du 1er décembre 2001, copie jointe, dans laquelle je vous demandais les motifs juridiques permettant l’affichage de la publicité pour la firme Morgan sur le site du ministère.

Depuis ma lettre, il s’est écoulé un délais de plus de deux mois. Je renouvelle donc ma demande. Il me semble en effet que l’administration ne peut refuser une explication sur la base juridique de ses actes, l’article 2 de la loi 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations indique, en effet, sans ambiguïté : « Les autorités administratives sont tenues d’organiser un accès simple aux règles de droit qu’elles édictent ».

Je crois raisonnable d’attendre votre réponse dans un délai de quinze jours.

Veuillez croire, Monsieur le Ministre, à l’expression de ma haute considération.

 

                                                                                                                      Christiane Levilly

J’adresse copie de cette lettre à Madame la Garde des Sceaux.

 

 

 

3) Courrier au Garde des Sceaux

 

 

 

 

 

Madame Christiane Levilly                                                                                         13 février 2002

43, Avenue de Paris

78000 Versailles

 

                                                                                                        A Madame la Garde des Sceaux

                                                                                                                   13, place Vendôme

                                                                                                                          75001 Paris

Lettre recommandée avec accusé de réception

 

 

Madame la Garde des Sceaux,

 

J’ai l’honneur de porter à votre connaissance les faits suivants.

 

J’ai fait part de ma surprise à Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale de voir ses services publics organiser une campagne publicitaire intitulée « Le respect ça change l’école » au profit d’une entreprise privée, Morgan.

 

Par courrier du 1 décembre 2001, voilà donc plus de deux mois, (lettre recommandée avec accusé de réception n° 2755 35 72 0FR), j’ai demandé à Monsieur le Ministre quelles étaient les motivations en droit de la décision d’organiser une telle campagne publicitaire (voir copie jointe).

 

A ce jour, je n’ai toujours pas reçu de réponse.

 

Or, l’article 2 de la loi 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations indique sans ambiguïté : « Les autorités administratives sont tenues d’organiser un accès simple aux règles de droit qu’elles édictent ».

 

J’ai donc l’honneur de m’adresser à votre haute autorité pour que me soit communiquées ces informations afin que soit assurée par votre intervention personnelle l’entière transparence de la justice rendue au peuple français.

 

 

Veuillez agréer, Madame la Garde des Sceaux, l’assurance de ma haute considération.

 

 

                                                                                                                      Christiane Levilly

 

 

 

 

4) Réponse du Ministère de l’Éducation nationale.

 

 

                                                                                                                             Paris le 25 fév. 2002

 

 

 

Délégation

à la communication

 

DELCOM

n° 117

 

Afaire suivie par

Eric BARRAULT

Téléphone

01 55 55 14 70

Télécopie

01 55 55 27 21

Mel

eric.barrault

@education.gouv.fr

 

110 rue de Grenelle

75357 Paris 07 SP

 

 

 

 

 

 

Madame,

Vous m'avez interrogée sur la mention, sur les affches de la campagne « le respect, ça change l'école », d'un partenariat avec la marque « Morgan ».

Bien que les considérations juridiques que vous invoquez ne soient en aucun cas pertinentes, puisqu'il ne s'agit en l'espèce ni de l'édiction d'une règle de droit, ni d'une décision faisant grief, je réponds bien volontiers à votre demande d'information.

Le Ministère de l'Education nationale se réserve, dans ses campagnes d'intérêt général, la possibilité de conclure des accords de partenariat avec des entreprises.

C'est ainsi que se sont associées à la campagne en faveur de la notion de respect à l'école, notamment, Okapi, Muteen, skyrock, manuscrit.com, la RATP, l'Union de la publicité extérieure, mais aussi la fédération française de handball, la fédération française de football. Ces partenariats ont permis à la campagne de trouver un écho amplifié, des déclinaisons nouvelles.

En ce qui concerne particulièrement la société Morgan, je tiens à vous préciser que celle-ci s'est engagée à apporter, à partir des ventes du T-shirt au sigle de la campagne, un financement à l'association « stop la violence ».

Je puis également vous indiquer que ce partenariat était limité à la première phase de la campagne, à l'automne 2002.

Lors des manifestations organisées dans les établissements ou à l'occasion de rencontres sportives ou culturelles, les T-shirts ou sweat-shirts au sigle de la campagne qui sont distribués aux participants ne comportent aucune marque commerciale.

Espérant que ces précisions ont pu apaiser vos inquiétudes, je vous prie de bien vouloir agréer, Madame, l’expression de ma considération distinguée.

                                                                                      La déléguée

                                                                                à la communication

                                                                              Catherine LAWLESS

 

 

 

 

5) Contre réponse au Ministère de l’Éducation nationale.

Christiane Levilly

43 avenue de Paris 78 000 Versailles

Tél. : 01 39 02 12 14

Lettre recommandée avec accusé de réception n° :

 

 

Versailles, le 19 mars 2002

 

 

Monsieur le Ministre de l'Education nationale

Monsieur Jack Lang

110, rue de Grenelle

75 357 paris 07 SP

Monsieur le Ministre,

J'ai bien reçu votre courrier du 25 février concernant la campagne publicitaire organisée en partenariat entre le Ministère de l'Education nationale et la marque « Morgan ». Je suis au regret de vous dire que loin d'apaiser mes inquiétudes, celui-ci n'a fait que les augmenter. Ma question ne portait pas, en l'occurrence,   sur « l'édiction d'une règle de droit » ou sur «une  décision  faisant  grief»,  mais sur  « les motivations en droit» de  cette  campagne publicitaire.

Vous écrivez:  «Le Ministère de l'Education nationale se réserve [...]  la possibilité de conclure des accords de partenariat avec des entreprises. »   Voulez-vous dire que le Ministère de l'Education nationale « se réserve le droit de... »... en dehors des règles de droit ? Mais cela ne peut pas être.

Le Ministère de l'Education nationale, écrivez-vous, « conclut des accords de partenariat avec des entreprises. » Comme vous le savez, cela ne peut se faire sans respecter les règles de la déontologie du service public.  Par exemple, on peut comprendre que le MEN conclut un accord avec des personnes morales qui ont mission d'intérêt général (en l'espèce, la RATP, la Fédération   française   de   Hand-Ball...).   Mais   comment   pouvez-vous expliquer que des entreprises Skyrock, Muteen ou Okapi, voire radio NRJ, Fun Radio, le magazine Phosphore, Freever... sont investies d'un tel statut ?

D'autre part, si le Ministère de l'Education nationale a signé un accord de partenariat avec l'entreprise Morgan, cet accord devient un acte administratif. Comme vous le savez, le MEN a signé un accord de partenariat avec le Groupe Suez-Lyonnaise des eaux (accord cadre du 13-12-2000 / NOR : MENE0100283X / RLR : 847-1 / MEN-DESCO) ; un autre encore avec le Groupe PSA-Peugeot-Citroën (Accord du 23-11-2000 NOR:    MENE0100306X / RLR :501-4)...   Ces  contrats  de  partenariat,  parce  qu'ils  s'inscrivent  dans  des  cadres administratifs, ont fait l'objet d'une publication au BOEN Spécial n° 5 du 15 mars 2001.

Or, en consultant le site du MEN sur le site « Le respect ça change l'école », je n'ai pas trouvé référence de ce texte administratif. Sauf erreur de ma part, le texte de cet accord de partenariat n'apparaît  dans aucun  BOEN.  J'ai  donc  l'honneur de vous demander de bien vouloir m'envoyer une copie de cet accord de partenariat.

Vous ajoutez que l'entreprise Morgan « s'est engagée à apporter, à partir des ventes du T-shirt au sigle de la campagne, un financement à l'association « Stop la violence ». Pouvez-vous, en même temps, me communiquer copie de cet engagement de Morgan, ainsi que les résultats financiers.

Vous ajoutez : « Je puis également vous indiquer que ce partenariat était limité à la première phase de la campagne, à l'automne 2002. » Vous parlez au passé d'un événement à venu". Voulez-vous dire que la « première phase de la campagne se terminera à l'automne 2002 » ou bien s'agit-il d'une coquille portant sur l'année (« automne 2007, vouliez-vous écrire » ?).

Dans le premier cas, on ne comprendrait pas pourquoi vous écrivez (http://www.éducation.gouv.frdossier/rcspect/bilan.htm  mise à jour : janvier 2002 .) : « La première phase de la campagne Le respect, ça change l'école' donne aujourd'hui lieu à un bilan très positif [...] ».

Dans le second cas, si la première phase de l'opération a pris fin à l'automne 2001, en quoi consiste la deuxième phase ? Y aura-t-il une troisième phase ?

Et, dans tous les cas, nous sommes en droit de vous demander quel est le montant des sommes que Morgan a versées à l'association « Stop à la violence », puisque cela fait partie du «bilan très positif». Je suis au regret de constater que la page Internet ne donne aucune information concrète au citoyen.

Mais encore, vous indiquez : http://www.education.gouv.fr/dossier/respect/teeshirt.htm  : «Des tee-shirts ont été fabriqués pour la première vague de cette campagne par la société Morgan. Une partie du prix de vente (c'est moi qui souligne, C.L.) est reversée à l'association 'Stop la violence'. » Que devient alors, « bilan » fait, l'autre partie ?

Enfin, comme vous le savez, le sigle « Le respect, ça change l'école », continue (au titre de la deuxième phase de la campagne ) de figurer en bonne place sur le site du Ministère de l'Education nationale. Vous ne pouvez ignorer que ce logo a valeur publicitaire pour la firme Morgan, même, d'autant plus dirais-je, que son nom n'apparaît pas directement (mais continue à être présent sur des centaines de sites éducation.gouv) . Est-ce que cette présence-absence a fait l'objet d'un nouvel acte de partenariat avec ladite entreprise ? Si oui, quel est-il ? Si non, pourquoi ?

Je sais que vous ne manquerez pas de répondre à toutes les questions d'une mère de famille inquiète. Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma haute considération.

Christiane Levilly

Mère de famille

 

 

 

 

 

6) Réponse du Ministère de la Justice.

 

 

 

 

MINISTERE DE LA JUSTICE                                                                            Paris le 3 avril 2002

 

 

 

La Chef de Cabinet

de la Garde des Sceaux

Ministre de la Justice

Référence à rappeler : CAB/REQ/MC/FV/MI/P281821

 

                                                                                                              Madame Christiane LEVILLY

                                                                                                                              43, avenue de Paris

                                                                                                                            78000 VERSAILLES

 

 

 

Madame,

 

Vous avez bien voulu appeler l'attention de Madame Marylise Lebranchu, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, sur les informations de nature juridique que vous souhaitez obtenir.

Madame la Ministre m'a chargée de transmettre votre courrier à Monsieur le Directeur des Affaires Civiles et du Sceau, auquel elle a demandé de procéder à un examen attentif de ce dossier et de vous informer de la suite susceptible de lui être réservée.

 

Je vous prie d'agréer, Madaiiie, l'expression de nia meilleure considération.

                                                                                                        Mathilde CASTERAN

 

 

 

 

Ministère de la Justice 13, Place Vendôme 75042 PARIS Cedex 01

 

 

 

 

 

 

7) Réponse du Ministère de l’Education nationale par courrier électronique à un autre membre du collectif.

 

 

 

From: "BEAUMORT Stephane" <stephane.beaumort@education.gouv.fr

To: <ivoltaire@freesurf.fr

Cc: "REMY Sonia" <sonia.remy@education.gouv.fr

Subject: Re: "technique"

Date: Fri, 24 May 2002 15:19:43 +0200

 

 

Bonjour,

 

En réponse à votre courrier, je vous renvoie tout d'abord aux textes officiels parus dans les dossiers de presse du 6 octobre 2001 et du 20 mars 2002. Vous pourrez les trouver à partir des archives de la page "Nouveautés" du site www.education.gouv.fr ou bien au sein même de la rubrique "Respect". Ces textes définissent précisément le cadre de nos différents partenariats.

Le cas de "Stop la violence", à cet égard, est quelque peu atypique, car il ne s'agit pas à proprement parler d'un partenariat, plutôt d'un coup de pouce informel à une association dont les actions et le sérieux ont paru mériter une mention particulière dans nos pages, et qui a bien voulu relayer de son côté notre campagne. La société Morgan s'était engagée à réaliser un t-shirt et à le vendre dans ses magasins, puis à reverser un pourcentage des ventes à cette association, ce qui a été fait.

Pour le reste, le partenariat initial ne prévoyait aucune durée, et n'attribuait aucune exclusivité à cette société sur la réalisation et la diffusion de t-shirts (dont le visuel nous appartient d'ailleurs) ; c'est pourquoi le ministère a choisi, pour le deuxième volet de la campagne, de permettre à toute école ou association qui en fait la demande de réaliser à ses frais des t-shirts semblables pour les diffuser lors de manifestations locales.

Morgan a toujours le droit de vendre ses propres t-shirts "Respect", selon les termes du partenariat défini l'an dernier. En revanche, la vente des t-shirts réalisés et distribués par le ministère ou par des écoles ne rapporte rien, ni à Morgan, ni à Stop la violence. En ce qui nous concerne, le partenariat est terminé, c'est pourquoi vous n'en trouverez plus mention sur notre rubrique "Respect".

J'espère avoir répondu à vos questions.

Cordialement,

 

Stéphane BEAUMORT

Cellule internet

Ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche

 

 

Monsieur Beaumort, auteur de cette lettre, a souhaité que nous diffusions le droit de réponse dont nous reproduisons ci-dessous le texte :

« Bien que ne reniant pas la paternité de ce courrier ni son contenu, sa publication en ligne (qui s'est faite sans que j'aie été consulté au préalable), le place au même niveau que les courriers d'un chef de cabinet, d'une présidente de commission, d'une déléguée à la communication ministérielle, et d'un membre de cabinet : cela laisse penser à tort que j'aurais pu être impliqué dans les prises de positions de l'institution, alors que je n'en étais, comme assistant-webmestre, que le plus modeste porte-parole.
Etant tout comme vous sensible aux questions de dérive et de protection des libertés fondamentales, et en vertu de mon droit de rectification, je souhaite qu'il en soit fait mention dans cette page.
M. Stéphane Beaumort »

 

 

 

8) Réponse de la CADA

 

 

Liberté · Égalité · Fraternité

________________________

République Française

P R E M I E R   M I N I S T R E

Cada

commission d’accès aux

documents administratifs

www.cada.fr

 

Madame LEVILLY Christiane

43 avenue de Paris

78000 VERSAILLES

La Présidente

                                                                                Paris le 26 juin 2002

Référence à rappeler : 20022467-MD

Madame,

La commission d’accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 13 juin 2002 la demande dont vous l’avez saisie par lettre parvenue à son secrétariat le 28 mai 2002, à la suite du refus opposé à votre demande de communication de la copie du contrat de partenariat signé entre le ministère de l’éducation nationale et la firme Morgan.

En réponse à la demande qui lui a été adressée, le ministère de l’Éducation nationale a informé la commission que ce contrat n’existait pas : aucune convention n’a été signée avec l’entreprise Morgan qui, à l’instar d’autres sociétés du secteur de la mode, a été destinataire d’un courrier lui proposant un partenariat qui ne s’est pas concrétisé par la suite.

La commission n’a pu, dès lors, que déclarer sans objet votre demande d’avis.

Je vous prie de croire, Madame, à l’assurance de ma considération distinguée.

                                                                                   Pour la Présidente

                                                                                 Le Secrétaire général

                                                                                     J.-P. LERENDU

 

 

 

 

 

9) Nouveau courrier au Ministère de l’EN suite à la réponse de la CADA

Christiane Levilly

43 avenue de Paris 78 000 Versailles

Tél. : 01 39 02 12 14

Lettre recommandée avec accusé de réception n° :

 

Monsieur le Ministre de l'Education nationale

Monsieur Luc Ferry

110, rue de Grenelle

75 357 paris 07 SP

 

 

4 août 2002

 

Monsieur le Ministre,

J’ai interrogé à plusieurs reprises votre Ministère sur les liens existants entre la campagne « Le respect ça change l’école » et la firme “Morgan”.

Dans un courrier du 25-02-02, la Délégation à la communication de l’Éducation nationale se félicitait des multiples accords de partenariat avec des entreprises et écrivait : « C’est ainsi que se sont associées à la campagne en faveur de la notion de respect à l'école, notamment, Okapi, Muteen, skyrock… »

J’ai donc l’honneur, en vertu de la loi 2000-321 du 12 avril 2000, de vous demander de bien vouloir m’adresser les contrats de partenariat entre le Ministère et ces entreprises.

Pouvez-vous également, à l’issue de l’année scolaire, me communiquer le bilan de cette campagne : son coût, son incidence sur les violences et désordres scolaires…

Madame Lawless, Déléguée à la communication indiquait : « Ces partenariats ont permis à la campagne de trouver un écho amplifié, des déclinaisons nouvelles. » Je suis donc fort surprise de la réponse de la Commission d’accès aux documents administratifs (copie jointe) qui m’informe de l’absence de contrat entre votre Ministère et la firme “Morgan”. La Commission précise : « aucune convention n’a été signée avec l’entreprise Morgan qui, à l’instar d’autres sociétés du secteur de la mode, a été destinataire d’un courrier lui proposant un partenariat qui ne s’est pas concrétisé par la suite. »

La réponse de la CADA suscite de nombreuses et graves questions, j’en poserai aujourd’hui quelques unes :

-     si aucun accord, aucun partenariat n’a été conclu avec “Morgan” comment expliquer que le site du Ministère de l’Éducation nationale ait présenté durant des mois une publicité pour cette firme ?

-     comment comprendre que les affiches destinées à cette campagne (affiches largement diffusées dans les établissements scolaires et lieux publics) invitant, elles aussi, à se rendre dans le réseau “Morgan” ?

-     pourquoi cette publicité pour “Morgan” plutôt que pour “une autre société du secteur de la mode” ?

-     cette publicité se terminait par cette indication : « Des tee-shirts, spécialement fabriqués pour cette campagne de sensibilisation, sont en vente dans son réseau - Pour un prix public de 100 F TTC, 30 F seront reversés par Morgan à l’association “Stop la violence” ».

      Le Ministère s’autorise-t-il à financer sans contrôle une association avec l’argent collecté auprès de nos enfants ?

-     si aucun accord ne s’est concrétisé, comment qualifier ce qui a permis la réalisation de ces affiches, tee-shirts ou sweat-shirts ? que concrétisent-ils donc ?

      Le 25 février vous écriviez : « Le Ministère de l’Éducation nationale se réserve [...] la possibilité de conclure des accords de partenariat ».

      Dans mon courrier du 19 mars (resté sans réponse) je formulais notamment cette question : « Voulez-vous dire que le Ministère de l’Éducation nationale “se réserve le droit”… en dehors des règles de droit ? »

Sans explication de votre part, je conclurai qu’il n’y a ni contrat, ni accord, ni aucune règle à respecter.

Espérant que vous apporterez des réponses à toutes les questions d’une mère de famille de plus en plus inquiète, veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mes entiments républicains.

 

C. Levilly

 

 

 

 

 

 

 

10) Nouvelle réponse édifiante du Ministère de l’EN

 

 

 

Liberté Égalité Fraternité

République Française

                                                                                Paris le 5 septembre 2002

                                                                                                   Madame Christiane LEVILLY
                                                                                                   43,avenue de Paris
                                                                                                   78 000 VERSAILLES

Madame,

En charge de la communication Jeunesse au cabinet du précédent Ministre, sous la
responsabilité de Madame Catherine LAWLESS, Déléguée à la communication du Ministère,
je négociais les partenariats que vous évoquez dans les deux courriers adressés à Monsieur le
Ministre en date du 4 août 2002.

Je tiens avant tout à vous remercier d'avoir pris la peine de nous écrire pour nous faire part de
vos inquiétudes. Vous touchez là à une question essentielle : celle de la synergie d'actions
possible entre l'Etat et des partenaires privés.

La sphère des médias jeunes (Phosphore, Okapi, Muteen..) peut aider notre ministère à élargir
la diffusion de son information - et c'est son rôle. Parfois les médias s'engagent au-delà de la
simple information. Avec une forme de leur choix, il manifeste alors le souhait de soutenir des
opérations institutionnelles : c'est à ce moment que l'on peut parler de partenariat.

Parce que l'argent n'est jamais intervenu dans la négociation des partenariats avec la presse
« Jeunesse », aucun contrat n'a été officiellement rédigé. Il s'agit là d'ententes débouchant sur
des échanges. C'est alors l'intérêt propre que les parties tirent du partenariat qui leur permet
de s'assurer de la tenue des engagements respectifs, en plus du contrôle rigoureux et régulier
qu'il impose.

Avec le privé, l'Etat s'expose toujours lorsqu'il crée de tels liens ou partenariats. Aussi,
veille-t-il en permanence à ce que le choix du partenaire et le choix des termes de l'entente
envisagés se situent dans la droite ligne des missions de service public.

S'agissant de l'entreprise Morgan, l'idée du partenariat reposait sur la volonté d'étendre la
communication relative à la campagne « le Respect ça change l'école » au monde extra-
scolaire, de toucher les lieux de vie des jeunes, de les persuader que certaines valeurs aident à
mieux vivre ensemble. Elle a été choisie à l'issue d'un appel à candidature : c'était la seule
entreprise qui a pu ou su répondre au cahier des charges que le ministère proposait.
Les sociétés Gap, Kookai, Benetton, Agnès b, Carrefour, Addidas, mango, Etam, NafNaf
avaient donc été sollicitées.

Les termes du partenariat ont, entre autres choses, impliqué que la société Morgan reverse à
l'Association « Stop la Violence » (choisie par la Présidente du Comité anti-violence) une
partie des bénéfices de l'opération.

1 396 T-shirts ont été vendus dans les boutiques « Morgan », au prix de 100 flancs TTC
l'unité (dont 30% sont revenus à l'association « Stop la Violence »). Comme vous pouvez en
juger, le message « Respect » n'a pas fait vendre, et c'est bien dommage.

C'est paradoxalement du côté des établissements scolaires que la demande de T-Shirts s'est
accrue. Pour y répondre, et de façon à surmonter le problème lié à l'impossibilité de distribuer
des T-shirts signés de la marque dans les écoles (que la société Morgan était polwtant prête à
distribuer gratuitement), le Ministère dût rompre ses liens avec son partenaire, et passa
commande auprès d'une société de production sélectionnée à l'issue d'une mise en
concurrence.

Ces nouvelles conditions non partenariales, financièrement coûteuses pour le Ministère, l'ont
contraint à limiter la production des nouveaux T-shirts. Ainsi n'a-t-elle pas été suffisante pour
satisfaire la demande très motivée des chefs d'établissements désireux de participer à la
campagne « Respect » en vu d'améliorer le climat ambiant de leur établissement.

La société « Morgan », de son côté, n'étant plus associée à la campagne, n'a plus jamais
figuré sur aucun document de communication.

Sachez encore combien vos remarques ont pu attirer notre attention. Dans l'espoir d'avoir
répondu à toutes vos questions, je vous prie de croire, Madame, à l'expression de mes
salutations le plus distinguées.


Julie Navarro