DOSSIER

INTERVENTIONS DES ENTREPRISES EN MILIEU SCOLAIRE

Restaurer la neutralité scolaire


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Préambule



LA neutralité scolaire est le premier et le plus épais rempart contre l’intrusion de toute idéologie économique dans l’enseignement public. La détruire c’est à terme permettre au monde économique et financier privé de s’emparer non seulement d’une des mannes financières les plus importantes que constitue l’Education mais c’est aussi lui permettre à terme de décider seul la raison d’être de l’Education. Nous ne le voulons pas.

La nature des relations entre les établissements scolaires, de l’école primaire à l’université, et le monde qui lui est « extérieur » a considérablement évolué depuis qu’existent ses relations. Depuis la fin du 19ème siècle nombreuses ont été les circulaires ou autres notes de service des instances responsables de l’enseignement public qui ont rappelé le principe de neutralité scolaire. L’école devait être protégée des influences de ce monde extérieur et essentiellement du monde économique : pas de commerce dans l’enseignement public quel qu’en soit sa forme, sa finalité avouée ou non. La dernière note de service on ne peut plus précise en la matière date du 2 septembre 1999. Depuis la vapeur a été inversée et c’est à un revirement de 180 degrés auquel nous avons assisté à peine entrés dans le troisième millénaire. La circulaire n°14 publiée au Bulletin Officiel de l’Education Nationale du 5 avril 2001 a marqué ce revirement. Intitulée « Code de bonne conduite des interventions des entreprises en milieu scolaire » (CDBC) elle réinterprète et transforme la neutralité scolaire en admettant que les entreprises puissent être des « partenaires » privilégiés de l’Education nationale en instaurant notamment la « neutralité commerciale » de l’école. Claude Allègre, ministre socialiste de l’Education nationale de 1997 à 2000 n’avait il pas dit que « l’école sera le grand marché du 21ème siècle » ?

Juridiquement les interventions des entreprises en milieu scolaire sont aujourd’hui, soit tolérées dès l’instant où elles respectent les termes du CDBC (conventions de partenariat), soit interdites si la justice s’appuie sur les circulaires antérieures. En effet, le 1er juillet 2004 le Tribunal administratif de Cergy Pontoise (Val d'Oise) a considéré que « la décision prise par le proviseur du lycée Auguste Blanqui d'autoriser le déroulement [d’un jeu concours organisé par le groupe bancaire CIC] dans l'établissement est illégale » au motif, notamment, « que ce jeu qui avait clairement des objectifs publicitaires et commerciaux pour la banque organisatrice [...] contrevenait également au principe de neutralité de l'école rappelé par de nombreuses circulaires et notes de service émanant du ministre de l'éducation nationale. »

Depuis nos protestations contre le CIC (jeu concours « Les Masters de l'économie » précité), contre la publicité pour Morgan (chaîne de magasins de vêtement) sur le site du Ministère de l’EN, contre les affichages publicitaires dans les écoles (Lycée Collège Hélène Boucher), et les protestations d'autres associations (RAP, Casseurs de Pub, Action Consommation) ainsi que celles de particuliers un peu partout en France, le Ministère de l’Education nationale est devenu très prudent et les conventions de partenariat prévues par le CDBC sont bien existantes, ce qui n’était pas toujours le cas au début de la publication de cette circulaire.

Une initiative qui demanderait beaucoup de temps serait de combattre juridiquement chaque partenariat, un par un, en s’appuyant sur la jurisprudence conséquente à la décision du tribunal de Cergy-Pontoise. Cela demanderait également des moyens que nous n’avons pas et le débordement vouerait cette action à l’échec. Ainsi, il nous est apparu que, aidé d’un spécialiste en droit administratif, il est indispensable de tenter de prouver l’aspect contradictoire de l’extension du principes de neutralité scolaire en principe de « neutralité commerciale » de l’école tel que le CDBC le redéfinit et l’incohérence des dispositions de ce texte avec ce qu’il est sensé empêcher. Par ailleurs, il serait nécessaire d’établir un bilan faisant état de TOUS les textes qui aujourd'hui permettent ces partenariats depuis la publication du CDBC à rechercher non seulement dans les circulaires mais aussi dans la loi Fillon et le Code de l’Education ; la décision du Conseil d’Etat ayant rejeté un recours en annulation du CDBC est à étudier également de près car ceux qui soutiennent cette circulaire se prévalent de cette décision alors qu’il semblerait que ce rejet ne confirme en rien sa justesse ni sa cohérence.
A la lumière de ces investigations il serait utile de dresser un rapport argumenté.

Nous pouvons déjà constater qu’il y a un paradoxe juridique :

D’une part, Gilbert Molinier, professeur de philosophie, a formé un recours en annulation du CDBC dès sa publication en avril 2001 devant le Conseil d’Etat qui a rejeté sa demande. Il aura fallu un peu plus d’un an et demi pour que cette juridiction se prononce en se limitant à rappeler des points de pure forme. Le Ministère de l’Education nationale s’appuyant alors sur cette décision a rejeté nos demandes d’interdiction du jeu concours du CIC, tant sous l’actuelle majorité que sous la précédente.

D’autre part, malgré l’échec de ce recours, Gilbert Molinier a par ailleurs poursuivi son établissement scolaire devant le tribunal administratif de Cergy Pontoise pour faire interdire le jeu concours du CIC. Comme nous l’avons vu, ce tribunal lui donnait gain de cause et considérait le jeu concours « Les Masters de l’économie » illégal. Le dispositif du jugement est très important car cette décision n’ayant pas été frappée d’appel peut faire jurisprudence. Elle redonne du sens à la neutralité scolaire et ignore superbement la notion de « neutralité commerciale » énoncée par le CDBC.

Il nous apparaît donc ici deux contradictions. La justice administrative reconnaît l’illégalité d’un jeu concours qui, selon le Ministère de l’Education nationale, entre pourtant dans le cadre de la circulaire CDBC ; et pour justifier sa position, ce Ministère s’appuie sur le rejet de la demande d’annulation de ce CDBC décidé par le Conseil d’Etat alors que cette haute juridiction n’a en rien statué sur une quelconque question de fond et n’a rien décidé qui soit susceptible d’être interprété comme une justification de cette position...

Désormais, plus aucun recours n’est possible devant le Conseil d’Etat, le changement ne peut donc être que politique en annulant le CDBC par voie ministérielle ou parlementaire. Cela, le Collectif Attac IDF Education le réclame depuis 2001 et c’est adressé en ce sens aux députés de l’assemblée nationale en juin 2003 ; toujours dans ce sens, Attac nationale a publié un communiqué de presse en décembre 2001. Elle est aussi, avec d’autres associations, co-signataire d’un manifeste réclamant depuis un an l’annulation du CDBC. Mais ce n’est peut-être pas suffisant.

Il s’agit de rétablir dans les textes la notion de neutralité scolaire telle qu’elle existait avant le CDBC non seulement en demandant l’annulation du CDBC mais aussi tous les textes qui lui sont concomitants. Pour compléter nos justification, le rapport argumenté que nous préconisons devra également faire un bilan des effets de la réinterprétation de la neutralité scolaire formulée par ce CDBC, il pourrait alors être le moyen de parvenir à nos fins.


Dans les documents de ce dossier, vous trouverez les éléments essentiels de nos recherches, réflexion et actions. A vous de vous en emparer afin de nous aider à élaborer ce rapport argumenté.



Le Collectif Attac Ile-de-France Education


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